Le quotidien de la vie militaire
Un grand nombre de soldats américains et français avait déjà combattu de longues années durant dans cette guerre. Ceux-là aspiraient avant tout à retourner au plus tôt dans leur patrie. Les États-Unis et la France ont ainsi, pendant l’occupation, procédé à la relève d’une partie de leurs troupes. Les Forces américaines en Allemagne (A.F.G.) qui, à partir de l'été 1919, ont remplacé l’armée d’occupation, ont ainsi été constituées avec des soldats américains plus jeunes et moins expérimentés, mais peut-être aussi, moins accablés par l’expérience de cette guerre.
La France de son côté eut, pour environ un cinquième des effectifs, recours à des troupes coloniales tant, après quatre années passées au front, de nombreux Français voulaient rentrer chez eux. Cela a pu procéder d’une certaine volonté d’humiliation des Allemands. En même temps, la crainte que le simple Poilu puisse, s’il restait plus longtemps en Allemagne, ramener le communisme chez lui a joué un rôle. Les crimes comme les viols, dont la propagande allemande accusait principalement les troupes coloniales, ont fait, de la part des Français, l’objet d’enquêtes approfondies. Les accusations correspondantes se sont en règle générale révélées infondées.
0.1.1.Ludwigshafen, 6 décembre 1918
« La France ne peut pas demander à ses troupes de couleur de ne pas participer à l’occupation, après avoir été aux avant-postes pendant la guerre. En outre, l’Entente estime que les soldats de couleur protègent contre l’arrivée du bolchevisme en France. » (journal d'Armand Stiegelmann, collection privée)
0.1.2.Dörscheid (Rhin moyen), 5 janvier 1919
« Le soir, les sentinelles ont pénétré dans la cave de Schnorres et elles ont profité du schnaps. Quand le capitaine s'en aperçut, les deux malfaiteurs furent arrêtés. A l’appel du matin, ils durent dénoncer leurs complices. Nous découvrîmes que l‘un d'eux devait monter la garde trois fois consécutives. » (Anneliese Spieß, Deutsches Tagebucharchiv 3724-1)
Cependant, les relèves de troupes n'empêchaient guère que de nombreux soldats se languissaient de leurs familles et qu’ils s'ennuyaient en Allemagne. En règle générale, ils devaient faire acte de présence, mais n'avaient guère d'autres tâches que l'entraînement militaire ou monter la garde devant les casernes, les dépôts et les ponts sur le Rhin.
Les commandants militaires avaient conscience du danger d'excès ou de débordement. Ainsi, en collaboration avec des organismes civils comme le YMCA, ont-ils organisé des activités pour les Doughboys et les Poilus, des activités sportives allant des courses de chevaux à la boxe en passant par le baseball.
Dans la zone américaine, des événements culturels comme des spectacles de cirque ou des événements musicaux, des concerts de jazz, ou encore des soirées dansantes, ont marqué le cadre de vie des soldats. Nombre d’entre eux ont fait des voyages dans la vallée du Rhin ou visité des bâtiments historiques. Cependant le soir, les soldats s’adonnaient à des boissons alcoolisées, ce qui en Rhénanie - contrairement aux États-Unis - était généralement autorisé. Les Allemands pouvaient les leur vendre selon certains créneaux horaires.
0.1.3.Rapport de l'aubergiste de Bitburg Heinrich Kaufmann, 1925
« Maintenant j'ai le temps de vous rapporter certains évènements ayant eu lieu pendant les longues années d'occupation.
En 1918, un officier américain m'ordonna de lui remettre 5 bouteilles de vin. Je lui refusai et je gardai les clés de la cave avec moi car la remise de tout alcool aux troupes américains était interdite sous peine de sanction grave. Alors il se rendit à la porte de la cave avec un soldat et lui fit ouvrir avec une pince-monseigneur et il prit 10 bouteilles de vin sans les payer. » (Landeshauptarchiv Koblenz, 700, 12-16)
Auteurs
Traduction: Jacques Cercelet et de Jean-Claude Dufourd (Animation en Côte chalonnaise)
Textes et Édition: Dr. Walter Rummel (Landesarchiv Speyer), Dr. Hedwig Brüchert; Dr. Ute Engelen, Marion Nöldeke, Dr. Kai-Michael Sprenger (tous Institut für Geschichtliche Landeskunde Rheinland-Pfalz e.V.), Franziska Blum-Gabelmann M.A. (Haus der Stadtgeschichte Bad Kreuznach), Dr. Eva Heller-Karneth (Museum Alzey), Dr. Armin Schlechter (Landesbibliothekszentrum Rheinland-Pfalz, Pfälzische Landesbibliothek)