Pénétration culturelle par des moyens pacifiques
L’un des objectifs français de l'occupation de la Rhénanie de 1918 à 1930 était la « pénétration pacifique ». La culture et la langue françaises devaient être communiquées à la population afin de générer un état d’esprit pro-français. Dès le 28 novembre 1918, avant même l'arrivée des troupes, le général français Gérard fait diffuser aux habitants du Palatinat une déclaration selon laquelle, dans les zones à occuper, la France souhaitait conquérir « les cœurs et les esprits ».
Il a également rappelé l'époque napoléonienne, lorsque les régions allemandes de la rive gauche du Rhin furent partie intégrante de l'État français. En Rhénanie, à la Toussaint ou aux Cendres, dans les cimetières où figuraient des monuments napoléoniens, les Français organisèrent des célébrations qui, surtout dans les zones rurales, suscitèrent un grand intérêt. Il y eut aussi toute une série de cérémonies militaires à travers lesquelles la puissance occupante se présentait comme un garant de l'ordre public. Lors de parades et de relèves de gardes, mais aussi en d’autres occasions, les musiques militaires organisèrent des concerts plutôt bien accueillis par la population.
La « pénétration pacifique » a été torpillée du fait de mesures contradictoires prises par la puissance occupante elle-même. Ainsi à chaque occasion, dans les zones situées sur la rive gauche du Rhin, cette dernière favorisait le « séparatisme », car cela semblait mener plus rapidement au résultat souhaité par la France. Cependant la fermeture de la frontière le long de la rive droite du Rhin et les nombreuses mesures pesant sur l'économie et la vie quotidienne allèrent à l'encontre de la « pénétration pacifique ». La politique culturelle française s'est finalement avérée infructueuse. Les fossés psychologiques qui trouvaient leur origine dans l'image de « l'ennemi juré » puis qui furent renforcés par le traité de Versailles étaient bien trop importants. Le grand besoin de sécurité et de réparations, central dans la politique française, a permis à la propagande allemande d’accuser la France de cupidité pour les terres allemandes et de volonté d'anéantir le peuple allemand.
Lettre de Margarete W., 11 Août 1919
« Un voyageur a récemment tenu le beau propos qui suit: Les Français ont plus germanisés en quatre mois que les Allemands en quarante ans. C'est vrai, l'histoire du monde se développe souvent en référence à des exemples effrayants et elle obtient ainsi des succès plus profonds qu'avec des modèles vertueux. » (Archives allemandes des journaux intimes, 1200-1T)
1.1.2.Lettre pour intimider des bourgeois de Spire ayant assisté à un concert français
« Des hommes de confiance ont remarqué que vous aviez participé au concert de l'administration militaire française organisé pour des raisons de propagande le .... Ainsi vous avez déplu à une grande partie de la population fidèlement allemande de notre ville. Vous allez objectez que vous avez participé au concert par pur intérêt artistique. Nous ne pouvons pas accepter cette objection car à la situation politique actuelle il est indigne d'un Allemand d'assister à des concerts de propagande française. Dans un premier temps, nous renonçons à publier votre nom sur les colonnes d'affichage comme nous supposons que c'était un lapsus de votre citoyenneté fidèlement allemande. C'est pourquoi nous vous prions de remettre à plus tard votre intérêt pour la musique exotique,
1.) en respectant l'opinion de la majorité de vos concitoyens
2.) pour vous épargner des ennuis.
Que Dieu conserve le Palatinat allemand !
Certains qui ont souffert de vous voir flatter l'ennemi ! »
(Stadtarchiv Speyer, 191-2 Nr. 207)
Auteurs
Traduction: Jacques Cercelet et de Jean-Claude Dufourd (Animation en Côte chalonnaise)
Textes et Édition: Dr. Walter Rummel (Landesarchiv Speyer), Dr. Hedwig Brüchert; Dr. Ute Engelen, Marion Nöldeke, Dr. Kai-Michael Sprenger (tous Institut für Geschichtliche Landeskunde Rheinland-Pfalz e.V.), Franziska Blum-Gabelmann M.A. (Haus der Stadtgeschichte Bad Kreuznach), Dr. Eva Heller-Karneth (Museum Alzey), Dr. Armin Schlechter (Landesbibliothekszentrum Rheinland-Pfalz, Pfälzische Landesbibliothek)